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Électricité

Hausse de tarif abusive

L’Autorité de la concurrence défend la modération du tarif réglementé d’EDF et contredit la Commission de régulation de l’énergie, qui exige une hausse de 5,9 %. Explications.

On n’attendait pas l’Autorité de la concurrence dans le rôle de défenseur des consommateurs face à la Commission de régulation de l’énergie (CRE), l’autorité indépendante du secteur, qui va nous imposer une forte hausse du tarif réglementé d’EDF (1), + 5,9 % au plus tard le 1er juin. C’est pourtant ce qui se passe. « 40 % de la hausse proposée ne correspondent pas à une augmentation des coûts de fourniture d’EDF mais ont pour but de permettre aux concurrents d’EDF de proposer des prix égaux ou inférieurs au tarif réglementé », dénonce l’Autorité dans un avis rendu public le 25 mars dernier.

Des prix du marché de gros moins compétitifs

Cette décision de la CRE ne doit en effet rien au hasard. Jusqu’au début de l’année 2018, les fournisseurs alternatifs avaient la vie facile. Les prix du marché de gros de l’électricité étaient inférieurs au tarif de 42 €/MWh qu’ils peuvent obtenir auprès d’EDF. Ils s’approvisionnaient sur ce marché à des montants leur permettant de faire des offres commerciales compétitives par rapport au tarif réglementé. Depuis, les prix de marché sont repartis à la hausse. Par conséquent, ces fournisseurs alternatifs achètent le quota auquel ils ont droit à 42 €/MWh auprès d’EDF. Pour le solde, ils s’approvisionnent au prix fort sur le marché de gros. Ne pouvant pas tenir très longtemps à ce rythme, ils vont être contraints d’augmenter leurs prix de vente. Mais s’ils passent au-dessus du tarif bleu d’EDF, c’est-à-dire réglementé, la clientèle va les fuir pour revenir à ce dernier. À l’exception de mastodontes de l’énergie comme Engie, Total ou Eni, et de cas particuliers comme celui d’Enercoop, dont les prix sont déconnectés du marché, ils vont faire faillite.

Aucun débat public transparent et éclairé

Ce serait sans conséquences pour l’alimentation en électricité : ces fournisseurs ne possèdent pas de moyen de production et leur disparition n’aurait aucun impact sur le réseau. Pourtant, la CRE augmente le tarif réglementé pour les sauver. Sa méthode aboutit à transformer le tarif réglementé « en un prix plafond du marché de détail, c’est-à-dire un prix représentatif des coûts des fournisseurs les moins efficaces », tacle l’Autorité. Elle ajoute même que ce changement « n’a pas fait, à ce jour, l’objet d’un débat public transparent et éclairé ».

La CRE traite désormais EDF comme s’il subissait les mêmes contraintes d’accès à sa propre production que les fournisseurs alternatifs, qui, pour la plupart, ne sont que des entreprises commerciales ne produisant pas le moindre kWh ! Malgré sa neutralité revendiquée, la CRE prend le parti de la rentabilité des fournisseurs alternatifs plutôt que celui du pouvoir d’achat des ménages. L’autre grand gagnant de ce tarif inflationniste, c’est EDF. Sa marge sur le tarif bleu va bondir de 87 %, a calculé l’Autorité de la concurrence ! Tout cela sur le dos des consommateurs, par la seule volonté de la CRE.

Le gouvernement pourrait agir

Le gouvernement n’a aucune prise sur la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Indépendante, c’est elle qui fixe et révise le tarif réglementé d’EDF. Seul le Conseil d’État peut intervenir. Jusqu’alors, à chaque fois que des gouvernements ont refusé d’appliquer les hausses voulues par la CRE, il a invalidé leurs décisions.

Pour les ménages, cela s’est soldé par des vagues de hausses rétroactives sur leurs factures. Si le gouvernement valide la hausse de 5,9 % demandée par la CRE, l’UFC-Que Choisir saisira  le Conseil d’État et réclame, en outre, la suppression de la TVA, à 20 % sauf exception, qui s’applique sur toutes les taxes des factures d’énergie. Et cette fois, la décision appartient au gouvernement.

(1) Cela concerne aussi toutes les offres dont le prix est indexé sur le tarif réglementé.

Élisabeth Chesnais

Élisabeth Chesnais

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