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Rappel de médicaments à base de valsartan

Pas de risque de cancer à court terme pour les patients

Selon une étude danoise, les personnes exposées à l’impureté présente dans les médicaments à base de valsartan ne seraient pas plus à risque de cancer que les autres. Dans le même temps, une nouvelle anomalie a été repérée dans les lots retirés du marché.

Une nouvelle impureté a été détectée dans les médicaments à base de valsartan. La découverte vient des États-Unis. L’Administration des denrées alimentaires et médicamenteuses (FDA) y mène actuellement des tests (1) sur plusieurs lots rappelés depuis juillet en raison d’une malfaçon. La NDMA (N-Nitrosodimethylamine) n’est pas la seule substance potentiellement cancérogène à se trouver dans ce traitement, indiqué notamment dans l’hypertension. Les autorités américaines ont également repéré de la NDEA (N-Nitrosodiethylamine), en plus faible quantité. Carcinogène suspecté, elle ne concerne que trois lots vendus outre-Atlantique. En Europe, l’Agence européenne du médicament (EMA) a promis des tests pour rechercher cette anomalie.

Cette annonce se produit alors que l’Agence danoise du médicament livre une première évaluation rassurante dans le British Journal of Medicine (2). Les patients qui ont pris ces médicaments à base de valsartan ne seraient pas plus à risque de développer un cancer, d’après une récente étude.

La dose serait sans effet

Près de deux mois se sont écoulés depuis le retrait de la moitié de ces génériques et la détection de cette impureté probablement cancérogène. De telles conclusions étaient donc très attendues.

Elles s’appuient sur le suivi de 5 150 personnes traitées pour une hypertension, une insuffisance cardiaque ou un infarctus. Ces individus ont tous reçu du valsartan entre 2012 – date à laquelle les premiers comprimés porteurs de l’impureté ont été commercialisés – et 2018. Mais tous n’ont pas pris des médicaments contaminés.

Par rapport aux personnes qui n’ont pas été exposées à la NDMA, celles qui l’ont potentiellement ingérée ne développent pas plus de cancers à court terme, constatent les scientifiques. Le risque n’augmente pas non plus avec la dose de principe actif.

Mais ce résultat vaut pour la maladie dans son ensemble. En analysant par organe touché, les chercheurs ont obtenu un résultat plus nuancé : une augmentation du risque apparaît pour le cancer colorectal et le cancer de l’utérus. Cependant, le nombre de diagnostic est si faible sur la durée de l’étude que cela ne permet pas de conclure de manière définitive.

Des incertitudes à long terme

« Cette seule étude ne permet pas de lever les doutes quant au risque de cancer à long terme, mais elle aide à la prise de décision concernant cette crise », concluent Rita Banzi et Vittorio Bertele de l’Institut de recherche pharmacologique Mario-Negri (Italie) dans un éditorial associé à cette étude (3). D’autres études seront donc nécessaires pour évaluer le risque de cancer sur une plus longue période.

Si ces résultats sont si positifs, c’est en partie grâce aux doses prises par les patients. En moyenne, ceux-ci absorbaient 80 à 160 mg de valsartan par jour. C’est bien moins que la quantité prise en compte par l’Agence européenne du médicament (EMA) lors de son évaluation des risques.

« L’EMA a estimé qu’il y aurait un cas de cancer supplémentaire pour 5 000 patients prenant la dose maximale de valsartan (320 mg) tous les jours pendant sept ans », rappellent les pharmacologues italiens dans leur éditorial. Ce calcul s’appuie sur le taux d’impureté relevé par le fabricant chinois du principe actif (60 ppm).

Connaître la quantité exacte de NDMA

Mais à l’heure actuelle, on ignore encore la quantité exacte de NDMA présente dans les comprimés. Elle pourrait fortement varier en fonction des fabricants et des doses. Cette inconnue doit être éclaircie pour comprendre le risque exact auquel sont exposés les patients. Les chercheurs danois l’ont d’ailleurs souligné : seule une partie des médicaments contenait « probablement » ou « possiblement » de la NDMA.

Cette phase d’examens approfondis va bientôt commencer en France. « Pour l’instant, chaque officine garde les médicaments concernés par le retrait dans une zone dédiée du stock, explique à Que Choisir Alain Delgutte, président du conseil central A à l’Ordre des pharmaciens. On les retournera aux grossistes-répartiteurs dans un deuxième temps. » Ce renvoi organisé serait prévu pour la semaine du 17 septembre.

La récupération des lots potentiellement contaminés va permettre leur analyse. Les firmes pharmaceutiques ont l’obligation de tester leurs échantillons. Des laboratoires de contrôle européens devraient aussi réaliser leurs propres études.

Ruptures de stock : la situation est sous contrôle

Après avoir retiré du marché la moitié des génériques à base de valsartan, les autorités sanitaires françaises ont craint des ruptures de stock. Contactée par mail, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) précise avoir « demandé aux laboratoires produisant du valsartan non concerné par le défaut qualité, ainsi qu’aux industriels produisant d’autres sartans, d’augmenter leur production ». Il faut dire qu’avec l’arrêt de la production, en Chine, de l’usine gérée par Zhejiang Huahai Pharmaceutical, un vide colossal s’est créé.

L’ANSM continue de surveiller étroitement la situation et a mis en ligne un tableau de suivi, par molécule et par dosage (4). Le valsartan 160 mg semble être la molécule la plus impactée par le retrait.

Sur le terrain, la situation est moins tendue. « Il existe encore quelques tensions avec Mylan mais il est possible de jongler avec les autres laboratoires et le princeps pour éviter les ruptures de stocks, précise Alain Delgutte, président du Conseil central A à l’Ordre des pharmaciens. Les grossistes que j’ai contactés me disent qu’ils tiennent à peu près au niveau des stocks. » Quant aux patients, ils ont arrêté de rapporter les boîtes concernées par le rappel.

Audrey Vaugrente

Audrey Vaugrente

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