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Sécurité sociale étudiante

La fin pour 2018 ou pour plus tard ?

Emmanuel Macron avait annoncé que les étudiants seraient rattachés directement au régime général de Sécurité sociale, revendication portée depuis 2012 par l'UFC-Que Choisir. Le principe est acquis mais le gouvernement hésite sur le calendrier.

Depuis l'étude de l'UFC-Que Choisir en 2012, suivie par un rapport de la cour des comptes en 2013 et un autre rapport du défenseur des droits en 2015, il n'y a plus vraiment de débat : le régime de Sécurité sociale des étudiants est une particularité à supprimer. Mis en place dans l'immédiat après-guerre, alors que la France comptait 150 000 étudiants à peine, il n'est plus du tout adapté à la situation actuelle. La France compte 2,5 millions d'élèves dans le supérieur, dont 1,8 million couverts par les mutuelles étudiantes. Chaque année, il faut inscrire et désinscrire des centaines de milliers de jeunes qui, pour la plupart, entreront dans le régime général.

Pour ne rien arranger, La mutuelle des étudiants (LMDE, 920 000 adhérents, soit un affilié sur deux) affichait jusqu'en 2014 des indicateurs de qualité de service désastreux, qu'il s'agisse de délais de remboursement ou de prise en charge des appels téléphoniques.

Placée sous sauvegarde judiciaire, elle a été reprise en main en 2015 par la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts), qui assure aujourd'hui le traitement des dossiers. Concrètement, la LMDE n'est plus que l'ombre d'elle-même et sa disparition totale serait à peine remarquée par les étudiants affiliés. Ceux qui sont rattachés à une des mutuelles régionales du groupe concurrent Emevia ont encore affaire à des entités réellement opérationnelles. Néanmoins, leur suppression devrait également se faire sans heurt. La Cnamts sait traiter les dossiers étudiants, et pourrait reprendre l'essentiel des salariés de toutes les mutuelles.

Seuls points en suspens, les complémentaires santé. Les mutuelles étudiantes en vendent, en plus de leur délégation de gestion du régime général. L'assurance maladie ne le fera pas. Cette activité de complémentaires pourrait facilement échoir à une mutuelle généraliste. Celles de la LMDE sont déjà gérées par Intériale, la mutuelle des fonctionnaires du ministère de l'Intérieur.

Bref, toutes les difficultés sont aplanies, le régime étudiant est déjà à moitié absorbé.

Sur le plan législatif, il suffirait d'un amendement au projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) en cours de discussion pour éclaircir la situation. Dès la rentrée 2018, les étudiants se trouveraient rattachés à la Sécu et à la complémentaire de leurs parents, jusqu'à leurs 20 ans. Ensuite, ils basculeraient dans le régime général et prendraient une complémentaire santé sur le marché. La fédération des associations générales étudiantes (Fage) et Solidaires étudiants sont favorables à ce schéma. « Nous souhaitons une bascule rapide », plaide Jimmy Losfeld, porte-parole de la Fage. « Il faut que ce soit voté dans le PLFSS pour une entrée en vigueur à la prochaine rentrée universitaire. Si la décision est prise plus tard, ce sera pour la rentrée 2019, nous dit le cabinet d'Agnès Buzyn, ministre de la Santé. »

D'abord le RSI, ensuite les étudiants ?

Un élément externe pèse sur le calendrier. La sécurité sociale se prépare à absorber le régime social des indépendants (RSI) en 2018, ce qui sera un chantier considérable. Il y a également la question délicate de la cotisation étudiante. Actuellement, les étudiants payent un forfait annuel de 207 € (ils ne peuvent pas cotiser comme les salariés, puisqu'ils n'ont pas de salaire, pour la plupart). La Fage et Solidaires demandent une adhésion gratuite. À trancher.

Le syndicat Unef défend pour sa part le particularisme étudiant, mais son point de vue est intéressé. Les représentants de l'Unef occupent tous les postes (rémunérés) d'administrateurs étudiants de la LMDE. La mort du régime lui ferait perdre des ressources financières significatives, à son échelle.  

Dernière interrogation, qui assurerait les missions de prévention (alcool et autres addictions, MST, etc.) assumées par les mutuelles étudiantes ? La position de Solidaires étudiants en la matière est détonante. « Ces missions sont complètement bidon, assène Florent Chapelle, porte-parole de Solidaires. Les mutuelles étudiantes, aujourd'hui, sont capables de subventionner des fêtes où tout le monde sait que l'alcool va couler à flot, tout en y distribuant des flyers contre les dangers de l'alcool. »

« Les enquêtes sérieuses (et non celles commandées par les mutuelles dont la méthodologie est rarement dévoilée) », dit Solidaires sur son site, montrent que les étudiants « n’ont pas plus de "comportements à risque" que le reste de la population, au contraire. » Un point déjà soulevé par Que Choisir en 2012...

Erwan Seznec

Erwan Seznec

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