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Lutte contre l’inflation

Les annonces gouvernementales décryptées

Le ministre de l’Économie a annoncé plusieurs mesures négociées avec les distributeurs et les industriels, dans l’espoir de juguler la hausse des prix sur les produits du quotidien. Décryptage.

Patrons d’enseignes et de grandes marques étaient convoqués à Bercy, les 30 et 31 août, par les ministres de l’Économie et du Commerce. Objectif affiché par Bruno Le Maire et Olivia Grégoire : obtenir des baisses de prix sur les produits du quotidien qui soient perceptibles pour les consommateurs. Jusqu’à présent, le trimestre anti-inflation n’a pas eu les effets escomptés et l’inflation repart. Interviewé sur France 2, ce jeudi 31 août, Bruno Le Maire reconnaissait d’ailleurs que « quelques prix baissent, mais pas beaucoup ».

Les ministres ont donc mis la pression sur les acteurs de la chaîne alimentaire. Et obtenu trois engagements, dont l’impact est à nuancer.

1. Industriels et distributeurs se sont engagés à « doubler le nombre de produits sur lesquels il n’y aura pas de hausse de prix, ou bien une baisse ». 5 000 références seraient concernées.

Comme lors des annonces précédentes, attention aux périmètres auxquels se réfèrent les chiffres cités. Il ne faut pas espérer 5 000 produits bloqués dans votre magasin favori. Ce seront en majorité des produits de marques de distributeur (MDD), donc spécifiques à chaque enseigne. Le nombre de références concernées par les baisses pour chacun des distributeurs sera donc nettement plus faible : ramené au nombre total de références (50 000 à 70 000 par enseigne), il tournera plutôt autour de 1 à 2 % de leur offre.

L’impact sur la facture dépendra des références concernées : les produits les plus achetés par les clients ? Des produits à faible fréquence d’achat ?

Si les prix demeurent stables, on reste à des niveaux de prix supérieurs de 25 % à ceux de janvier 2022. Si des baisses sont obtenues, de quelle ampleur seront-elles ? Dans tous les cas, il ne faut pas espérer un retour à la situation d’avant-crise.

2. « Lorsqu’un industriel baisse ses prix, [il y aura] répercussion obligatoire et immédiate de la baisse des prix en rayon. »

Sachant que les données sont couvertes par le secret des négociations, seule la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourra vérifier si cette promesse est tenue... D’après le ministre, ce n’est pas toujours le cas (lire l’encadré). Pourtant, les prix mondiaux des produits agricoles et de l’énergie sont redescendus à des niveaux plus modérés, et des fabricants ont consenti des baisses, en particulier pour les pâtes, les huiles et les volailles. Le patron de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania), Jean-Philippe André, confirmait le 29 août sur BFM Business que la répercussion en rayon n’était pas immédiate.

3. Réouverture des négociations tarifaires dès septembre entre les enseignes et les 75 plus gros industriels (1), avec comme objectif une baisse des tarifs dès janvier 2024.

Ces négociations se déroulent habituellement du 1er décembre au 1er mars, avec une répercussion dans les rayons dans les mois qui suivent.

L’échéance de début septembre est à nuancer. Les discussions ne pourront se rouvrir que si le gouvernement légifère pour autoriser le changement de date, un certain délai est donc inévitable. L’Ania table plutôt sur un engagement des négociations en octobre, voire novembre, pour aboutir à des accords au 31 janvier, donc des baisses à partir de février.

Le ministre balance les mauvais élèves

Bruno Le Maire se met au « name & shame » (nommer et couvrir de honte), une pratique qui consiste à pointer publiquement du doigt les marques qui n’agissent pas correctement. Certains industriels de l’agroalimentaire « ne jouent pas le jeu, a-t-il accusé. Unilever, Nestlé, PepsiCo, qui ont fait un peu, mais pas beaucoup, pourraient faire beaucoup plus que ce qu’ils font. »

Jusque-là épargnés par les critiques, les distributeurs ont également essuyé des reproches, par exemple pour n’avoir pas baissé le prix des packs de yaourt Danone, alors que l’entreprise laitière aurait fait un effort sur son prix de vente. De même, la baisse de l’huile Lesieur (marque du groupe Avril) n’aurait été répercutée que trois mois après au consommateur, permettant entretemps aux distributeurs d’augmenter leurs marges.

(1) Les PME ne devraient pas être concernées.

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