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Attention aux idées reçues

Vous prévoyez d’effectuer des travaux de rénovation ou de réparation et comptez faire appel à des artisans professionnels. Attention, la réglementation pourrait être différente de ce que vous pensez. Que Choisir fait le point sur les 5 idées reçues les plus communes.

Idée reçue 1 : « Je n'ai signé qu'un devis. Ce n'est pas un contrat ! »

Tant qu’il n’est pas signé par le consommateur, le devis remis par un artisan est une proposition de contrat. À ce stade, il engage uniquement l’artisan à maintenir les conditions indiquées pendant la durée de validité qu’il a pu mentionner.

Cependant, dès lors que le client a signé le devis, celui-ci devient un véritable contrat et engage chacune des parties contractantes (le professionnel et le client). Sauf exceptions légales, l’artisan peut aussi démontrer l’existence d’un contrat dès lors qu’il apporte des éléments sur l’acceptation du client (par exemple à la suite d’un courriel dans lequel le client indique un bon pour accord).

Rétractation

Il n’est possible de se rétracter dans un délai de 14 jours à compter de la conclusion du contrat que lorsque le contrat a été conclu :

  • à distance (par téléphone ou Internet) ;
  • hors de l’établissement habituel du professionnel, par exemple à domicile.

Deux conditions :

  • il ne doit pas s’agir de travaux réalisés en urgence ;
  • il ne faut pas avoir demandé au professionnel de s’exécuter immédiatement (par exemple par une case à cocher ou dans une mention manuscrite).

De plus, lorsque le devis précise que les travaux sont financés par un contrat de crédit, il est possible de se rétracter de celui-ci dans un délai de 14 jours à compter de l’acceptation de l’offre de crédit. La rétractation du contrat de crédit a pour conséquence la résiliation du contrat de travaux.

La loi impose au professionnel d’établir un devis avant tous travaux dans certains secteurs d’activité de dépannage, réparation et entretien concernant l’habitation (maçonnerie, isolation, menuiserie, serrurerie, couverture, plomberie, etc.). Pour assurer une information complète au consommateur, ce devis doit contenir certaines mentions à titre obligatoire.

Article 1113 du Code civil – Arrêté du 24 janvier 2017 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’équipement de la maison – Articles L. 221-18 et L. 221-28 du Code de la consommation – Articles L. 312-19 et L. 312-52 du Code de la consommation

Quid de la durée de validité du devis ?

La durée de validité indiquée sur le devis concerne le temps pendant lequel le professionnel s’engage à ne pas modifier l’offre. Si le client n’accepte pas le devis dans le délai indiqué, le professionnel n’est plus engagé par cette proposition. Il pourrait par exemple décider d’augmenter ses prix. Il faudra alors une nouvelle proposition de contrat.

En l’absence d’indication sur la durée de validité du devis, le professionnel devra maintenir son devis pendant un délai raisonnable avant de pouvoir le modifier. En cas de litige, cette notion de délai raisonnable sera laissée à l’appréciation des juges.

Article 1117 du Code civil

Bon à savoir. Grâce à la pétition lancée par l’UFC-Que Choisir et d’autres associations en 2020, le législateur a interdit le démarchage téléphonique dans le secteur des travaux de rénovation énergétique. Ainsi, sauf dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours, il n’est plus possible pour les entreprises de vous contacter par téléphone afin de vous proposer la vente d’équipements ou la réalisation de travaux d’économie d’énergie ou de production d’énergies renouvelables. En cas de constat du non-respect de cette interdiction lors d’un contrôle par les services de la répression des fraudes, l’entreprise est passible d’une amende administrative.

Articles L. 223-1 et L. 242-16 du Code de la consommation

Idée reçue 2 : « Pour tous les types de travaux, l’artisan est responsable pendant 10 ans. »

La responsabilité dite « décennale » du professionnel s’applique dans des conditions précisées par la loi et la jurisprudence :

  • il doit s’agir de travaux de construction d’un ouvrage immobilier (par exemple la construction d’une piscine enterrée). La responsabilité décennale peut aussi être engagée s’agissant de la pose d’éléments d’équipement destinés à fonctionner ;
  • les malfaçons constatées doivent être graves, c’est-à-dire compromettre la solidité de l’ouvrage ou rendre l’ensemble inapte à son usage (par exemple, si après la rénovation complète de votre toiture avec ajout de nouveaux éléments tels que chevrons, voliges, liteaux et panne faîtière, vous constatez de graves infiltrations, vous pouvez chercher à engager la responsabilité de l’entrepreneur).

Pour les travaux de faible ampleur (par exemple des petits travaux de peinture, de plomberie, ou la simple vérification d’une toiture avec nettoyage), la responsabilité décennale n’est pas applicable, car les conditions requises par la loi ne sont pas remplies. En cas de malfaçons avérées, le délai pour se retourner contre l’artisan n’est que de 5 ans.

Articles 1792, 1792-4-1 du Code civil – Cour de cassation, 3e civ., 7 octobre 1998, n96-22.837 – Cour de cassation, 3e civ., 9 novembre 1994, n92-20.804 sur la garantie décennale

Articles 1787 et 2224 du Code civil sur la responsabilité en cas de malfaçons

Assurez-vous du sérieux de l'entreprise avant les travaux

Avant de vous engager de manière définitive, n’hésitez pas à effectuer des recherches sur l’entreprise, par exemple en consultant les avis publiés en ligne par d’autres consommateurs. Multipliez les sources afin de comparer ces avis entre eux pour en vérifier la fiabilité et la pertinence.

Pour tous les types de travaux, vérifiez au préalable et en cours de chantier que l’entreprise ne fait pas l’objet d’une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaires) soit en contactant le greffe du tribunal de commerce du lieu de domiciliation de l’entreprise, soit en consultant les sites officiels d’annonces civiles et commerciales (Infogreffe, Sirene, Bodacc…).

De plus, à l’occasion de gros travaux, vérifiez que le professionnel vous a remis l’attestation d’assurance décennale avec le devis lors de l’ouverture du chantier (articles L. 243-2 et L. 241-1 du Code des assurances). N’hésitez pas à contacter directement l’assureur afin de vérifier avec lui que les travaux entrepris entrent bien dans le secteur d’activité déclaré par l’entreprise et dans le champ de garantie de l’assurance.

Idée reçue 3 : « Retenir 5 % du solde à payer, c’est sans risques ! »

Dans les contrats de construction (maison individuelle ou vente en l’état futur d’achèvement), la loi prévoit expressément un calendrier de paiement selon l’avancement des travaux avec la possibilité d’une consignation en cas de réserves émises à la réception.

Ces règles ne s’appliquent pas aux autres types de travaux. Dès lors que le contrat a été intégralement exécuté par l’entrepreneur, celui-ci est en droit d’exiger le paiement total de la prestation qu’il a fournie. Retenir 5 % du solde revient à ne payer la facture que partiellement. Sans accord préalable de l’artisan et sans motif valable, cela expose le client à des risques, par exemple des courriers de relance adressés par des sociétés de recouvrement, voire des pénalités de retard. Néanmoins, il est possible d’un commun accord entre le client et le professionnel de prévoir une clause fixant un échéancier des paiements selon l’avancement des travaux, que le client s’engage donc à respecter.

En outre, il est possible de prévoir dans les contrats de travaux une clause permettant de consigner les sommes entre les mains d’un tiers préalablement désigné en cas de litige. La consignation permet ainsi d’avoir un levier financier à l’égard de l’artisan en cas de conflit.

Que faire en cas de travaux mal exécutés ou non terminés ?

Dans le cas où la prestation n’est pas totalement terminée ou mal exécutée, la loi organise différentes sanctions. Il est possible, d’une part, de refuser de régler les échéances prévues tant que l’entrepreneur ne satisfait pas à ses engagements. D’autre part, si l’entrepreneur ne s’exécute plus, il est permis de réduire la facture de manière proportionnelle à ce qui n’a pas été réalisé. Il est nécessaire d’avoir au préalable mis en demeure par écrit le professionnel de s’exécuter en lui laissant un délai raisonnable pour finir les travaux.

Articles R. 231-7 et R. 261-14 du Code de la construction et de l’habitation – Articles 1104 et 1710 du Code civil – Arrêté n83-50/A du 3 octobre 1983 relatif à la publicité des prix de tous les services – Loi n71-584 du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l’article 1779-3° du Code civil – Articles 1217, 1219 et 1223 du Code civil

L’obligation de remise d’une facture

Pour toute prestation de service, notamment l’exécution de travaux, dépassant 25 €, le professionnel doit, dès l’exécution de ceux-ci et avant tout paiement, délivrer une facture (note) à son client. Il avait été établi par la jurisprudence que c’était à compter de l’établissement de cette facture que le professionnel pouvait agir, pendant un délai de 2 ans, pour en réclamer le paiement. Cette position était fortement défavorable au consommateur, car aucun délai pour émettre la facture n’est imposé au professionnel par la loi. Depuis un récent arrêt, la Cour de cassation est revenue sur sa position. Elle considère dorénavant que le délai de prescription de l’action en paiement d’une facture de travaux engagée par un professionnel contre un consommateur débute à compter de l’achèvement des travaux.

Cour de cassation, 3e civ., 19 mai 2021, n20-12.520 – Cour de cassation, 3e civ., 1er mars 2023, n21-23.176

Idée reçue 4 : « Une avance de 30 % du devis est obligatoire »

Hormis certains cas expressément prévus par la loi (contrat de construction de maison individuelle, vente en l’état futur d’achèvement), la somme à verser avant la réalisation de travaux avec un entrepreneur ou un artisan peut être définie d’un commun accord entre les parties. Aucun montant minimum ni maximum n’est donc défini légalement. En pratique, le professionnel détermine unilatéralement cette somme et la qualifie soit d’arrhes, soit d’acompte. Cette somme doit apparaître dans le devis.

Cependant, vous contraindre à régler l’intégralité des travaux avant leur réalisation ou exiger une somme disproportionnée eu égard au montant total du contrat pourrait être considéré comme abusif. En effet, la loi présume abusive la clause qui contraint le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas son obligation de fourniture d’un service.

Il convient d’être vigilant sur la qualification donnée à la somme versée d’avance. En l’absence de qualification expresse, il s’agit d’arrhes. Dans ce cas, vous pourrez vous dédire du contrat en perdant la somme. L’entrepreneur a aussi cette faculté, mais en restituant le double de la somme versée. Au contraire, si les sommes sont qualifiées d’acompte dans le contrat, celui-ci est définitif : le professionnel pourrait vous forcer à exécuter le contrat ou solliciter un dédommagement.

Article 1104 du Code civil – Articles L. 212-1 et R. 212-1 du Code de la consommation – Article L. 214-1 du Code de la consommation – Article 1590 du Code civil

Idée reçue 5 : « Je n’ai plus confiance en mon artisan. Je peux passer directement par une autre entreprise ! »

Tant qu’il n’a pas été mis fin régulièrement et expressément au contrat, celui-ci doit être respecté par les deux parties. Ainsi, en cas de rupture brutale du contrat par le client, sans justificatif ni démarches préalables, le professionnel est en droit de saisir les tribunaux pour obtenir un dédommagement. Il est donc risqué de s’adresser à un autre professionnel sans formalité préalable.

Cependant, si l’artisan ou l’entrepreneur ne s’exécute plus, il est possible, sous conditions, de faire appel à un autre professionnel. D’une part, il doit être démontré une inexécution grave de l’entrepreneur (malfaçons importantes, abandon du chantier depuis plusieurs mois sans raison légitime…). D’autre part, il est nécessaire d’avoir mis le professionnel défaillant en demeure, par écrit, de satisfaire à ses engagements dans un délai raisonnable tout en l’informant qu’à défaut, le contrat prendra fin et sera confié à un autre professionnel. En cas de non-réponse ou de refus de celui-ci d’exécuter le contrat, il est possible de s’adresser à un autre professionnel. Toutefois, en pratique, il peut être difficile de trouver un nouveau professionnel acceptant de reprendre le chantier à son compte. Par ailleurs, celui-ci demandera le règlement de la facture directement au client. Sauf accord avec le professionnel défaillant, seule une décision de justice pourra le contraindre de prendre en charge la facture du second professionnel.

Il est nécessaire de conserver toutes les preuves établissant qu’il y a eu une tentative de trouver un terrain d’entente avec le professionnel et qu’il n’a pas réagi de façon satisfaisante.

Articles 1103, 1217 et 1222 du Code civil

Le délai d’exécution de la prestation, une information essentielle

Au titre de son obligation d’information précontractuelle, le professionnel doit vous indiquer, notamment au travers du devis, la date ou le délai dans lequel il s’engage à exécuter la prestation. En l’absence d’indication ou d’un accord commun sur la date de réalisation des travaux, le professionnel doit s’exécuter dans le délai légal de 30 jours. Si le professionnel repousse sans cesse la date initiale d’exécution du contrat, vous devez le mettre en demeure par écrit de réaliser la prestation dans un délai supplémentaire raisonnable. S’il ne s’exécute toujours pas, vous pourrez rompre le contrat et exiger le remboursement des sommes versées le cas échéant en lui adressant un nouvel écrit.

Articles L. 111-1, L. 216-1 et L. 216-6 du Code de la consommation

Notre lettre type

Rénovation énergétique • Les points de vigilance

Vérifiez, avant la conclusion du contrat, que l’entrepreneur dispose de la qualification RGE (reconnu garant de l’environnement), et les catégories de travaux couvertes par cette mention. Il s’agit d’une condition obligatoire pour pouvoir bénéficier des dispositifs d’aides financières. Les conseillers des agences France Rénov’ peuvent vous permettre de trouver un artisan qualifié RGE, notamment grâce à un annuaire des artisans ayant cette certification, disponible sur leur plateforme en ligne. France Rénov’ est un service public qui accompagne et facilite les démarches des particuliers dans leurs travaux de rénovation énergétique.

Attention, il est parfois difficile de s'y retrouver parmi les différentes aides. Par exemple, il n’est plus possible de bénéficier du dispositif « Isolation à 1 € » pour les travaux engagés depuis le 30 juin 2022. Contactez les conseillers de France Rénov’ afin d’être guidé au mieux sur les dispositifs applicables selon les travaux envisagés.

Pour tous les types d’aides (primes CEE, MaPrimeRénov’…), lisez attentivement les conditions de la procédure pour déposer le dossier de demande. En effet, si les conditions ne sont pas réunies, votre demande risque d’être refusée. Ainsi pour les certificats d’économie d’énergie, le dossier de demande doit avoir été accepté avant que vous ayez signé le contrat de travaux.

En cas de litige avec un artisan qualifié RGE, vous pouvez signaler les faits auprès de l’organisme de qualification en remplissant le formulaire disponible sur la plateforme France Rénov’. En outre, si vous rencontrez des difficultés, n’hésitez pas à prendre contact avec votre association locale de l’UFC-Que Choisir.

Patricia Lorineau

Patricia Lorineau

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